Broderies d’un monde vivant
Une exposition personnelle de Philippe Jacq
28.10.2022 – 04.12.2022
Hors-norme, le travail pluridisciplinaire de l’artiste montpelliérain Philippe Jacq (1971, Algérie) bouscule nos horizons d’attente. Se positionnant comme autodidacte, l’artiste invité par Quartier Général revendique un art qui se concentre avant tout sur le concept d’hybridation culturelle et convoque, à cet effet, l’iconographie populaire et religieuse qu’il emprunte – sans hiérarchie ni limite – à tous les pays et à toutes les croyances. Dans ce dessein, il flâne volontiers dans les brocantes et les souks pour dénicher des tapis, broderies, affiches et objets variés qu’il assemble ensuite. La réappropriation d’éléments glanés çà et là témoigne d’un univers personnel multiculturel foisonnant, sans codes stricts ni contraintes où les représentations et les références cohabitent et oscillent entre l’Orient, avec des arbres exotiques et des cavaliers enturbannés sur des chevaux équipés d’harnachements colorés, et l’Occident, avec des chiens de chasse à courre et des super-héros masqués.
Jouant fréquemment avec les codes et les symboles, l’artiste aux multiples héritages les réunit et les détourne à l’envi pour produire des compositions impertinentes et des narrations éclatées. Pourtant, Jacq se distancie délibérément d’un discours politique ou conceptuel et se met ainsi volontairement en porte-à-faux avec les mondes de l’art contemporain, où le propos prime bien souvent sur la manufacture de l’œuvre. L’artiste se positionne plutôt comme proche de l’art singulier, dans l’acception de l’utilisation de matériaux « pauvres », souvent recyclés et détournés par le prisme d’un savoir-faire artisanal. Par ailleurs, il met en perspective l’image poétique de lui enfant, qui a acquis la capacité à « faire avec ce qu’il avait sous la main pour créer de nouvelles formes, de nouveaux outils ».
L’installation réalisée in situ à Quartier Général est en ce sens très significative : en réalisant une fresque patchwork, les œuvres reliées entre elles s’accumulent comme un puzzle pour raconter les 50 ans de vie de cet artiste qui ont été façonnés par le syncrétisme culturel et les bouleversements sociétaux. La structure circulaire englobante est alors révélatrice de son identité propre et de son envie d’ouverture vers l’autre, car la « rondeur invite à l’échange, c’est comme une piste de danse ». La rotonde devient ainsi son temple idéal, un abri renfermant son paradis, où tout se combine pour former un ensemble homogène et immersif.
Philippe Jacq, le chasseur, 2013